L’effondrement de la biodiversité, observé sur l’ensemble de la planète, confronte les sociétés humaines à des risques systémiques qui affectent la sécurité alimentaire, la stabilité du climat, la pérennité des milieux naturels, agricoles et urbains, la qualité des eaux et de l’air, etc.
Cette situation, extrême et inédite dans l’histoire du vivant, est directement corrélée à l’accentuation exponentielle des pressions de l’activité des sociétés humaines depuis les révolutions industrielles. Ces pressions sont de deux sortes :
- les facteurs directs : destruction des habitats, pollutions, surexploitation, changement climatique, espèces envahissantes ;
- les facteurs indirects : les modèles de production et de consommation, la croissance démographique, le commerce international, les innovations technologiques, les différents niveaux de gouvernance et les politiques publiques mises en place.
Ces facteurs sont largement documentés par la communauté scientifique. Bien que certains indicateurs restent incomplets, l’ensemble des données disponibles permet d’identifier les risques encourus par les sociétés humaines et de partager des constats. Au même titre que la question climatique, il n’est plus (vraiment) question de consensus sur le constat, mais de consensus sur les actions à mettre en œuvre, et les moyens alloués à ces actions.
Car ces pressions sur la biodiversité peuvent être atténuées en transformant en profondeur nos modèles. En 2019, la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques exhortait les décideurs politiques et économiques à engager des changements transformateurs pour préserver la biodiversité d’une extinction de masse causée par l’activité humaine.
Cette nécessité confronte l’administration publique au défi d’une transformation systémique pour penser la biodiversité comme un objet et un sujet majeur de l’action publique. Car l’effondrement de la biodiversité impose une action transversale aux différentes thématiques habituelles, mais aussi une intervention à plusieurs niveaux : la préservation, la restauration de milieux naturels, la renaturation, l’adaptation, etc.
Face à la complexité et la multiplicité des défis, l’action publique semble devoir se réinventer et se poser des questions relativement inédites. Quelles formes de représentation des intérêts d’entités vivantes non-humaines dans les instances publiques ? Quelle place accorder aux migrations végétales et animales dans l’aménagement et la planification urbaines ? Quels sont les nouveaux communs naturels à administrer ? Quels sont les futurs services administratifs de la biodiversité ? Quelles formes de coopération inédites ? Quelles nouvelles réglementations et normes pour garantir la primauté de la préservation de la biodiversité ? etc.
Soit autant de questions que ce projet cherchera à explorer avec les parties prenantes de l’action publique en deux temps : par l’enquête tout d’abord, puis par l’expérimentation.